La cathédrale de Syracuse, dite aussi cathédrale métropolitaine de la Nativité de la Sainte Vierge Marie, ou Duomo pour les intimes se trouve sur la place du Duomo au centre d’Ortigia. Elle est, entre autre, dédiée à sainte Lucie, patronne de Syracuse.
Malgré l’explication enthousiaste de l’audio-guide, la nef centrale ne semble pas particulièrement remarquable au premier abord. Elle est grande et assez belle mais on en a vu bien d’autres qui l’égalent ou la surpassent en taille et en majesté.
L’étonnement survient lorsqu’on comprend que les piliers massifs à section carrée qui séparent la nef centrale des nefs latérales sont des restes du temple grec antique qui s’élevait jadis à cet endroit et qui était consacré à Athéna. Les architectes ont « simplement » percé des ouvertures dans les murs très épais de la partie intérieure fermée du temple grec (la « cella »), en donnant à leur partie supérieure une forme d’arc en plein cintre.
Les deux nefs latérales sont tout aussi étonnantes car leurs murs extérieurs intègrent d’énormes colonnes doriques. Bien sûr ce sont également des vestiges du temple grec. Les espaces entre les colonnes ont été comblés par des murs car, à la différence des temples grecs, une église chrétienne se doit d’être entièrement fermée. Malheureusement la partie basse de ces comblements est recouverte d’un doublage en béton assez disgracieux.
Ce mélange des époques est curieux ; on se demande ce qui a pu pousser les bâtisseurs à préserver ainsi des éléments d’un culte qu’ils considéraient sans doute comme païen. Pour enfoncer le clou l’audio-guide nous apprend que la pierre du maître autel provient, elle aussi, du temple antique. Une bonne partie de cette cathédrale date donc du 5ème siècle avant Jésus Christ, ce qui est assez original. En d’autres lieux et en d’autres temps on se serait probablement efforcé de faire disparaître ces traces impies.
La chapelle dédiée à sainte Lucie est sans doute la plus importante pour les syracusaines et les syracusains. Sainte Lucie est la patronne de la ville et l’une de ses deux martyres chrétiennes avec saint Marcian. Leurs deux statues ornent la façade de la cathédrale, de part et d’autre du campanile. Le coffret en argent, sous l’autel de la chapelle, est censé contenir quelques os de la sainte.
Sainte Lucie a tant d’importance ici que plusieurs autres églises lui sont consacrées, portent son nom, et renferment le tableau du Caravage représentant son enterrement. Bien sûr, un seul est l’original, les autres sont des copies. L’original est peut être celui que nous avons vu hier dans la basilique Santa Lucia al Sepolcro. On peut voir ce qui est sans doute une copie dans l’église Santa Lucia alla Badia, à deux pas de la cathédrale, toujours sur la place Duomo. Il semble que ces deux églises se disputent le tableau, difficile d’y voir clair.
Une autre église d’Ortigia sort de l’ordinaire : la Chiesa di San Giovanni Battista n’a plus de toit.
Cette absence de toit lui donne un aspect d’autant plus particulier qu’elle semble encore utilisée. Des toiles sont accrochées aux murs, des chaises en plastique bien rangées font face à l’autel. Détail amusant, on voit les maisons voisines à travers le toit absent. Leurs fenêtres, le linge qui y sèche et les antennes paraboliques qui y sont accrochées semblent faire partie de l’église.